Jennie Zelda Litvack - L. Holstein & Company

1925 - 1926
1475 Bleury, Montréal

Né dans le quartier juif de Varsovie en 1910, Zelda Switzman est arrivée à Montréal en 1925, où elle est devenue connue sous le nom de « Jennie Litvack ». Avec l’aide d’une autre famille d’immigrants, Litvack a quitté son village, Yablonna-Legionowa, pour émigrer à Montréal. Elle a voyagé à Varsovie, Dantzig, Liverpool et Halifax, avant de rejoindre enfin son père, qui était arrivé à Montréal une année auparavant. Après s’être installé dans le quartier de Papineau, Litvack a quitté l’école rapidement, afin d’aider son père à subvenir aux besoins du foyer. Au début, elle a travaillé en tant qu’opératrice de machines à la Monarch Hat Company; grâce à sa rapidité et à son savoir-faire, ses services ont été en demande, à tel point qu’à l’âge de 20 ans, elle était déjà une contremaîtresse. Pendant plusieurs années, Litvack a fait les allers-retours entre Montréal et New York, en gagnant beaucoup d’argent pour faire son travail. Cela lui permettait d’envoyer la somme élevée de 100$ par mois à sa famille nombreuse à Montréal, dont la majorité des membres étaient arrivés en 1928. En 1932, Litvack est retournée à Montréal en permanence afin d’épouser son premier mari, un fourreur nommé Rashcovsky, avec qui elle a eu trois enfants. Par la suite, Litvack a continué de travailler dans l’industrie de l’aiguille et, après la Seconde Guerre mondiale, elle est devenue un membre du Parti communiste. Les bureaux de billets de paquebot et d’échanges de devises monétaires L. Holstein & Company (situés d’abord rue Notre-Dame, et par la suite rue Bleury), ont organisé l’immigration de Jennie Litvack à Montréal.

Voici un extrait de ses mémoires publié dans l’ouvrage de Seemah C. Berson, I Have a Story to Tell You (WLU Press, 2010) :

À cette époque, il y avait la Holstein Company – l’agence de voyages qui est encore active aujourd’hui [en 1974]. Ils préparaient tous les affidavits et l’ensemble des papiers, et tout, et vous pouviez ensuite les rembourser à raison d’un dollar par semaine. (184)

«Entering the needle trades» - Le compagnon de bateau de mon père (ils appellent ainsi une personne qui était avec lui sur le bateau) m’a amenée à l’usine pour apprendre le métier. Il se nommait Handler. Je savais coudre, parce que dans les écoles polonaises, on apprenait à faire des travaux raffinés, de la couture et de la broderie. Ma mère m’enseignait aussi ce genre de travaux. À cet endroit (c’était la Monarch Hat Company), ils vous enseignaient comment insérer une doublure dans un chapeau. C’était l’époque où l’on portait des chapeaux doubles. J’étais très habile pour accomplir cette tâche. La Monarch Hat Company était une entreprise de vêtements juive et le patron se nommait Max Solin. Ils étaient deux: Max et Jack. Jack était responsable des gens et Max s’occupait de tailler les vêtements. Max était le plus tranquille, tandis que Jack était le type agressif qui essayait de tirer tout ce qu’il pouvait des jeunes. La contremaîtresse affairée à la table de travail était une fille de deux ou trois ans mon aînée. Elle se nommait Lucy Goffman et elle était très gentille. Au début, elle m’a montré plusieurs trucs. J’ai appris très vite à travailler, et quand on devait se rendre au boulot le samedi matin, de huit heures à treize heures, elle me choisissait parce que j’étais rapide. (186-187)

«Taking my talent elsewhere» - À cette période, je gagnais huit dollars. Par la suite, la contremaîtresse s’est mariée et elle est partie en voyage de noces. J’imagine que j’avais été très efficace, car le patron m’a alors nommée responsable des filles qui travaillaient à la même table que moi. Et je gagnais seulement huit dollars. Je voulais obtenir trois dollars supplémentaires, afin d’atteindre onze dollars, ce qui représentait beaucoup d’argent pour moi à cette période. Il n’a pas voulu me les donner, alors j’ai quitté. Il était furieux. Je suis allée travailler à la compagnie New York Hats, alors dirigée par la famille Leopold. Cette famille possédait aussi une usine de chapeaux nommée The Canadian Hat. Je ne recevais pas onze, mais bien treize dollars! Si j’avais demandé plus d’argent, on me l’aurait accordé. J’étais si douée! Oui, j’étais très expérimentée. Je travaillais vite et j’étais très qualifiée. À l’époque, j’avais dix-sept ans. Vous savez, il avait fallu trois ans avant que j’obtienne treize dollars. (187)

Par Sarah Woolf et Seemah C. Berson. Traduit par Chantal Ringuet.

Links

Liens

"Montreal and the Jewish Community in the 1920s" - Our Tribute Everlasting by Alexander Wright (1984) - Jewish General Hospital Archives
I Have a Story to Tell You - Seemah Berson
Immigrants and the Needle Trade - Seemah C. Berson - Jewish Independent
Jewish Studies - Jewish Life in Canada - Véhicule Press
MP-1978.207.1.40 | Banque Dominion, angle des rues Bleury et Sainte-Catherine, Montréal, QC, vers 1915 - McCord Museum
Shedding Light on the Rag Trade - CBC Digital Archives

Sources

Berson, Seemah C. (ed.) I Have a Story to Tell You. Waterloo: Wilfrid Laurier University Press, 2010.

*Les images avec l'aimable autorisation de Faigie Coodin, Seemah C. Berson and Wilfred Laurier University Press, Archives nationales du Congrès juif canadien, Comité des charités, Archives de la Bibliothèque publique juive de Montréal (JPL-A) et du Musée McCord.

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